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Ultra Trail du Mercantour :

Seul ultra de l'année, cette fois-ci sans avoir eu de coach, pour être plus libre et pour modérer les ambitions, l'objectif étant d'avoir les points pour 2019, dans le cas où je vais en Andorre faire la Ronda car depuis octobre 2016 je n'ai plus dépassé les 85km. Donc c'est une reprise et un test physique et mental : ai-je encore envie de faire ce genre de course ?

Entre juin 2017 et la veille de la course, j'ai cumulé quasi 200000md+ avec sur 2018 des records de cumuls en dénivelé en trail, le volume est là et mai a été chargé avec 2 gros blocs. Par contre, je n'ai plus travaillé la vitesse seulement le seuil et l'endurance de résistance.

En ce qui concerne le parcours, je ne le connais pas et ne consacre pas beaucoup de temps à le décortiquer, je me limite à reprendre les temps de passages du 5ème et 10ème 2017, si je rentre dans les 10 cette année je serai pleinement satisfait.

J'applique la même recette alimentaire que pour l'Echappée Belle Nord, 1 barre et 1 gel pour 2h et boisson diluée 500ml/h. Aux bases vies, protéïne, Gu et pâtes + café si besoin. Sur le reste, alimentation à l'envie (banane, jambon, fromage et pain).

Le départ est compliqué, 4h30 de route pour aller sur le bord de mer récupérer mon dossard, j'y perds ma carte d'identité je tourne en rond et me stresse jusqu'à la retrouver... ensuite 45min de voiture pour traverser Nice et approcher de l'Aire St Michel sans pouvoir s'y garer.

Il fait 35°C au soleil, on trouve une pauvre place au soleil après être retourné faire le plein et acheter de l'eau, j'ai plus d'une heure pour me changer et mettre mes compeeds, les talons ne sont pas très bien protégés mais comme je n'ai pas eu d'ampoules aux pieds depuis 1an... je ne m'inquiètes pas plus que ça.

Je laisse Céline vers 16h20, on se retrouvera sur tout le parcours à commencer par le premier point d'eau dans 7km.

Au départ en sous bois je retouve Mickaël qui m'avait donné l'idée de faire cette course, on s'est préparé chacun de son côté et au moment de partir on se retrouve un peu emtâmé, lui étant malade. Le départ à 17h n'est pas facile à gérer.

Mickaël connait mieux les têtes de séries, vu la liste le top 10 va être difficile, je laisse tomber d'entrée cet objectif et me fixe simplement de finir avant minuit samedi soir on verra à la fin ce que ça donnera comme classement.

La douce voix d'Eric Ciotti nous invite à partir vite...le départ est donné à 17h et rapidement je perds Mickaël, c'est la bousculade des soldes... pfff, je me retourne plusieurs fois pour regarder la Méd et chercher Micka qui est en fait devant, on se retrouve au 7ème Km, Tourette (je suis dans le timing : 54min pour une fourchette de prév : 48 à 55min).

Je prends 500ml d'eau, il fait encore très chaud et pars avec Mickaël, on double Thibaud Gueyffier (on s'était vu au 1er trail du Queyras) et rattrape un coureur du TOR avant d'arriver à Chateauneuf (14km). 1h contre 1h06 de prévu, tout va bien. Là je prends plus d'eau et revois Céline et Tiago avant une portion plus longue. Je déconne avec les bénévoles qui sont très sympas.

La température baisse un peu mais il ne fait pas frais, on est avec ceux du 90km, c'est très compliqué de les distinguer, les places sont loin d'être établies, je ne sais pas du tout où j'en suis. Je discute avec un réunionnais et croise Philippe Guillemin (UT4M 100) qui sont tous les deux plus rapides que moi, je vois que je n'imprime pas le bon rythme pour espérer jouer avec les 10 premiers comme au ralenti dans un mauvais wagon. Je croise et recroise un coureur qui vient pour la 4ème fois après 3 abandons... il m'évite de rater un croisement, déjà 3 erreurs sans conséquence, heureusement après ce sera toujours bien balisé.

L'arrivée à la première base de vie, encore beaucoup de coureurs attablés je prends vite des pâtes et file retrouver Céline et Tiago sur l'espace assistance, je me change, prends la boisson, la bouffe et les frontales pour la nuit qui approche. Je commence à coincer mentalement, je trouve que c'est dur, le rythme est élevé et pas trouvé de coureurs sur le même tempo. Levens 30km (2h50 contre 2h40 de prévu et 8h37 de course, le 5ème 2017 avait mis 8h36.

Je repars avec la frontale de JB, test grandeur nature, je l'allume rapidement, deux coureurs me doublent, je suis plus prudent en descente pour mieux grimper ensuite.

Grosse ambiance au pont du Cros, on est très encouragé. Au village de Cros d'Utelle, on m'indique une source, je me rafraîchi le visage pendant que le coureur m'ayant doublé précédemment vide ses tripes, c'est le second que je vois dans cet état. 

Dans la montée je double l'autre coureur et ne me fais plus rattraper jusqu'à la chapelle d'Utelle où je double un coureur épuisé.

Le ravito d'Utelle (43km), village très joli, il fait plus frais, Céline et Tiago me remonte le moral, j'en ai besoin, c'est toujours aussi dur de rentrer dans la nuit. J'ai mis 2h50 sur cette étape pour 2h40 de prévu. Je les quitte en sachant que là j'entame le premier gros morceau et les retrouverais au petit matin au 70ème km.

Je souffre d'endormissement entre 23h et minuit, c'est très difficile de résister à ce besoin de dormir.

Les souvenirs sont vagues jusqu'à Andrion, je m'applique à courir aux sensations sans me préoccuper de poursuivre les autres participants, la seconde féminine et un coureur seront soit devant, soit derrière sur cette partie, le ravito est tenu par des bénévoles toujours très sympas ce qui permet de se détendre et de repartir bien remis. Andrion 55km (2h27 contre une fourchette de 2h31 à 3h), il fait frais 1680m, je mets un coupe vent. Regain de vitalité entre 1h et 2h du matin.

En repartant, je laisse des coureurs assoupis, la seconde féminine file avec un autre coureur vers le sommet.

A nouveau un endormissement entre 3h et 4h du matin, 2nd cycle de sommeil, je lutte et me traîne pour passer ce cap.

Un seul objectif, voir le soleil se lever sur la chaîne des Alpes dans la descente du sommet de la Tête de Courpatou 2065m (porte bien son nom). La descente me permet de rattraper le coureur qui accompagnait la 2nde féminine, la pente est très raide et glissante, c'est la première difficulté, les pieds et les quadri souffrent. Après le prés qui tue on se retrouve dans un pierrier et enfin le village, un coureur de doublé.

J'arrive satisfait mais fatigué à la 2nde base vie qui représente la moitié du parcours Roquebillière (70km 4400md+). Le réunionais repart, je ne le reverrais plus. 3h19 pour cette étape j'avais prévu 3h (pointage en sortie de ravito, mes arrêts s'allongent). 13h12 de course pour une estimation entre 12h46 et 13h10. Je suis encore pas mal même si le classement n'est pas celui espéré. Céline me réconforte pendant que Tiago finit sa nuit dans la voiture.

Je repars sur la partie montagneuse de la course avec un enchaînement de gros dénivelés. Je suis doublé rapidement par un coureur et rattrape un jeune coureur qui a mal au bide, je lui conseille de boire de l'eau pour diluer son bol alimentaire, il retrouve des personnes qui lui permette de se refaire et bien même, on fait toute la montée ensemble, un coureur nous aura doublé très vite et encore un autre nous suit à 200m. 80km de course et les places se disputent encore et toujours.

Je trouve cette montée très longue et du coup pénible à gérer, heureusement elle débouche sur une très belle vue.

Après la séparation avec le parcours du 90km, je demande au premier contrôle qui suit notre place, nous sommes 18 et 19ème. Pas si mal, cela permet de compter désormais le classement.

J'arrive dans la vallée des Merveilles qui est vraiment magnifique, au 85km. 3h11 pour une estimation entre 2h49 et 3h13, je suis toujours dans le coup, la chaleur revient, Tiago et Céline me réconfortent. Il s'agit maintenant d'avancer le plus possible avant la prochaine nuit. Mickaël perdra connaissance ici sans explication, il sera arrêté par le médecin de course. Toute la course, je pensais qu'il pourrait me rattraper et comptait sur son retour pour ne pas abandonner.

Le jeu est maintenant simple, 1 grosse montée, 1 grosse descente et 1 ravito. Ca me suffit pour le peu de concentration que je peux mettre. Dans la montée, à la Cime de la valette (2496m) 90km, on a doublé quelques coureurs dont Florian, on doit être 15 et 16ème. La vue est vraiment belle, ça justifie d'être venu jusqu'ici. Un coureur me dépose dans une traversée. Je commence à avoir de plus en plus mal au pied, les ampoules se forment aux talons sous la corne.

J'arrive au ravito de la Madone, 97km pas trop mal. Le jeune coureur a mal à la cheville, il abonnera ici. Les bénévoles sont au top, ils m'expliquent la suite, il fait très chaud. La seconde féminine refait surface, je la croyais devant, très entourée, elle finira malgré tout par abandonner. Par contre ma vitesse décroit fortement en descente, je mets 3h07 pour une prévision entre 2h41 et 2h51. Moralement ça commence à se durcir.

Reprise difficile, à nouveau un endormissement après celui de 9h, je n'avance pas très vite mais c'est toujours mieux que de s'allonger dans l'herbe pendant 1h. Je suis désormais lent en montée... la descente vers Boréon me permet malgré tout de doubler Florian et de rattraper celui qui m'avait déposé à la cime de la Valette.

Base vie de Boréon, 107km. 22h10 de course, contre 21h à 21h47. En retard, pas catastrophique mais difficile pour le moral. Céline m'aide à me refaire.

Je repars sur une fin de course modifiée, je n'ai plus de prévision fiable, ce qui est sûr c'est que ce sera la partie la plus difficile, je vais galérer jusqu'à la Colmiane (124km).

Après une grosse montée de 1000md+ en 6km (où un vieux chamois reste proche de moi, un court instant et un hélico tourne pas loin me sortent de ma torpeur), en compagnie de Florian, une descente de 1000md- en 3km (Florian me dépose), suivi d'un faux plats montant pendant 7km... sans avoir pris assez d'eau (heureusement des bénévoles m'en donnent une peu d'eau au Chastel 118km), subi une averse, j'arrive après 4h37 depuis le Boréon. Déjà 26h47 de course à la Colmiane, je suis détruit, les pieds me font mal et j'ai envie d'arrêter. Le fait de ne plus me repérer dans les vallées, craindre des montées infernales, je vois des coureurs à la place des troncs d'arbres ...me cassent le moral.

J'irai voir une voiture que ne sera pas celle de Céline et me résigne à reprendre la course.

Sur les 19km qui restent, le décompte kilométrique m'aide à tenir, 3km facile, puis 5km de montée, dans une forêt où les souches ressemblent à des animaux, je vois, un loup, un écureuil, une marmotte , j'entends des coureurs (je commence à avoir des hallucinations visuelles et auditives, ça faisait longtemps que je n'en avais pas fait). Au dernier sommet (Caire Gros 132km 28h52), la frontale sur la tête, le bénévole rentre en connexion avec mon cerveau reptilien "il reste 10km, 3km pour le dernier ravito, tu es 15ème, tu suis le balisage, gauche, droite...". Je débranche tous les signaux de douleurs et de démotivation, m'accroche à cette foutue 15ème place que m'avait annoncé Laurent et me fais mal pour que les 2 frontales qui me suivent restent à distance.

Je donne tout, fais un dernier ravito express, recroise Céline à 3,5km de l'arrivée tout sourire, ça me booste et ne traîne pas pour espérer rester à cette place... voilà dernier pointage avec les chiens qui aboient et me donnent dans cette nuit noire les écarts avec mes deux chasseurs... je file comme un lapin à travers les sentiers, vite, vers la délivrance...avant minuit. 30h30, (le 10ème en 2017 avait mis 31h09)... . 15ème. 142km 9880md+.

304 à prendre le départ, 163 de classés (avec une partie des coureurs qui à cause des orages seront déviés plus rapidement sur St Martin de Vésubie le dimanche). 141 abandons ou mises hors course, dont des favoris, notamment Samuel Vergès 4ème à l'Echappée Belle en 2017 (aba : Chastel 118km), Sylain Camus (aba : Col d'Amberlatte 40km) et Peter Kienzl 1er Trans Gran Canaria-360 2017 (aba : Madone 98km).

Une course rude où il faut se préparer à des descentes particulièrement raides. La prochaine fois me faudrait avoir le portable allumé en permanence car le suivi du frérot est hyper précis avec les écarts, l'idéal serait une montre avec les messages.

(images et vidéo du site officiel de l'UTCAM merci).

Relive 'Ultra Mercantour.'

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